Pratiques inclusives et réussites : le point de vue des étudiants handicapés
Anaelle Milon  1@  , Clémence Bonafé  1@  , Saeed Paivandi  1@  
1 : Laboratoire Interuniversitaire des Sciences de l'Education et de la Communication
Université de Lorraine

Cette communication présente les résultats d'une recherche qualitative visant à comprendre la manière dont les étudiants handicapés s'approprient l'environnement pédagogique et social de l'université. Les recherches sur l'expérience des étudiants handicapés se développent depuis quelques années en France, en s'intéressant souvent aux interactions entre ces étudiants atypiques et leur contexte pédagogique (Milon, 2020 ; Vérétout, 2019). Mobilisant une approche sociologique compréhensive, notre recherche s'intéresse à la perception et à l'appréciation subjective que l'étudiant construit vis-à-vis de son contexte d'études, à travers les interactions et les activités collectives, d'enseignement et d'apprentissage. Les pratiques pédagogiques des enseignants du supérieur ont fait l'objet de peu de recherches en France (Paivandi et Younes, 2019) et l'effet des facteurs pédagogiques sur la réussite étudiante reste une question « globalement en suspens » (Duguet, Le-Mener et Morlaix, 2016). Selon les étudiants handicapés, en quoi les pratiques pédagogiques et universitaires inclusives influencent-elles leur(s) réussite(s) ? La réussite est une notion polysémique, multidimensionnelle et ambiguë (Annoot, 2016). Elle peut être réduite à la performance de l'apprenant selon les normes de l'institution (réussite formelle). Cependant, elle peut aussi s'appuyer sur la perspective de l'étudiant et la qualité de son apprentissage, sur le sens accordé à l'acte d'apprendre. Notre problématique interroge à la fois la signification de la réussite pour les intéressés et l'influence des pratiques inclusives sur leurs réussites (formelle, académique, éducative...).

Les données sont issues d'entretiens compréhensifs menés de 2020 à 2021 auprès d'étudiants identifiés handicapés par L'Université de Lorraine. Bénéficiant de mesures de compensation du handicap, ces étudiants sont inscrits dans différents niveaux (licence et master) et filières universitaires (sciences, santé, lettres et sciences humaines, droit économie gestion).

Les résultats de l'enquête mettent en évidence la diversité qui caractérise les étudiants handicapés, tant vis-à-vis de leurs caractéristiques personnelles (types de troubles et besoins spécifiques, héritage social et scolaire) que de leur expérience universitaire. L'analyse porte sur la manière dont les étudiants perçoivent et apprécient leur environnement d'études : les pratiques pédagogiques et les relations entretenues avec leurs enseignants, l'accessibilité de l'apprentissage et de la vie universitaire, la compensation universitaire du handicap. Ces éléments sont mis en lien avec les réussites des étudiants, qu'il s'agisse de la réussite académique formelle (performances, résultats, progression dans les niveaux), mais également d'autres formes de réussites en fonction du sens subjectif que l'étudiant accorde à l'apprentissage et à ses études, en fonction de ses attentes vis-à-vis de l'enseignement supérieur et de ses projets (professionnels et personnels).

La discussion questionne, d'une part, le développement des pratiques inclusives et de l'accessibilité universelle dans un contexte où la compensation universitaire du handicap s'adresse à un public restreint et repose souvent sur des services et des acteurs spécifiques. D'autre part, la discussion s'intéresse aux différentes conceptions de la réussite dans l'enseignement supérieur, selon les critères retenus et le point de vue adopté. La prise en compte de la subjectivité des acteurs, du sens et des projets des étudiants, questionne l'usage et les fonctions de l'université. En effet, l'université est un lieu de développement intellectuel, de professionnalisation mais aussi un lieu de socialisation qui peut permettre l'épanouissement et l'émancipation.


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