Si près de 80% d'une classe d'âge réussit le baccalauréat en France, environ 100000 jeunes quittent dans le même temps le système éducatif sans aucun diplôme chaque année. Pour ceux-là, le Diplôme d'Accès aux Études Universitaires (DAEU) est l'unique dispositif permettant d'obtenir un équivalent du baccalauréat et de pouvoir reprendre des études.
Porté par l'université, ce diplôme recrute des personnes aux profils et aux parcours particulièrement variés. Selon Borras (2020), le diplôme capte une population moins qualifiée que la moyenne, majoritairement des employés (72%) mais aussi une forte proportion de demandeurs d'emploi et d'actifs précaires. Pour ces personnes en reprise d'études, comme pour les étudiants à l'université, la période est une période de transition « ponctuée de défis que l'étudiant devra pouvoir relever pour s'adapter à son nouvel environnement » (Perret et De Clercq, 2020). Dans ce contexte, Beaupère et al. (2020) relèvent la complexité des parcours et la singularité des phénomènes d'abandon. Des parcours marqués par des motivations diverses, parmi lesquelles la recherche de légitimation sociale, la restructuration d'une trajectoire via la reconnaissance procurée par la reprise d'études, la quête de sens d'une formation et l'attente d'une nouvelle position au sein du milieu familial (Zaouni-Denoux, 2014).
Nous avons voulu comprendre quels étaient les parcours de ces personnes et en quoi le dispositif du DAEU favorisait – ou non - leur réussite. Ainsi, notre recherche poursuit une double ambition : épistémique, afin de mieux comprendre la dynamique de formation dans laquelle s'inscrivent les stagiaires et le lien avec leur réussite, et transformative afin d'améliorer la conduite du dispositif.
Pour ce faire, nous nous sommes appuyés sur le cadre théorique de Michaut et Romainville (2012) qui identifient des facteurs de réussite et d'échec : caractéristiques sociodémographiques et psychologiques, passé scolaire, conditions de vie, représentations et conceptions, conditions d'études, etc. Dans un premier temps, nous avons convoqué cette approche pour construire un questionnaire avec le logiciel LimeSurvey qui a été adressé aux cinq dernières promotions d'une université de l'est de la France (soit 329 anciens stagiaires). Dans un deuxième temps, nous avons complété les données par des entretiens semi-directifs menés auprès des volontaires afin de leur permettre de revenir plus précisément sur leur parcours et l'expérience vécue au cours de la formation.
Du côté des parcours des répondants, nos résultats mettent en avant le sentiment de rupture vécu par les stagiaires au cours de la préparation au DAEU en comparaison avec leur parcours antérieur dans le cadre scolaire, notamment en ce qui concerne les manières d'apprendre, les relations avec les pairs et l'accompagnement. Pour les stagiaires ayant poursuivi un projet de formation post-DAEU, l'enquête pointe également les difficultés rencontrées lors du parcours universitaire.
Notre étude questionne également le dispositif lui-même et souligne l'importance accordée par les anciens stagiaires aux méthodes d'accompagnement des équipes pédagogiques et administratives, tant l'année du DAEU qu'au cours des formations post-DAEU, ainsi que le lien qu'ils font entre la relation pédagogique et la « réussite » de chacun.